samedi 17 janvier 2015

Article sur la France publié sur un journal vénézuélien de 1939

En parcourant mes sources j'ai trouvé aujourd'hui cet article, publié il y a 75 ans. Il m'a semblé tellement beau et en accord avec les semaines que l'on vient de vivre que j'ai voulu le partager avec vous....

AMAE, Série B « Nouvelle Série », Venezuela, 1918 – 1940. Direction des affaires politiques et commerciales. Sous-direction d’Amérique. N°  264, dossier 1 (mars 1928-mai 1940). Correspondance générale politique, N° 3. Fol. 252-254

Fol. 252
Direction des Affaires Politiques et Commerciales
Amérique
N° 60
Caracas, 2 Décembre 1939

Objet : article de « La Esfera ». La vie en France

M. Armand Barois, Ministre de France à Caracas,
À Son Excellence, Monsieur Édouard Daladier,
Président du Conseil, Ministre des Affaires Étrangères,

            « La Esfera », un des journaux de Caracas qui a le plus de diffusion, a fait paraître le 26 novembre un article où son auteur, qui signe « Spectateur », fait un éloge vibrant de la France et de sa civilisation.
            Vous voudrez bien trouver ci-joint cette étude, traduite in extenso, et qui a été rédigée, m’a dit le rédacteur en chef que j’avais féliciter à cette occasion, par un basque espagnol qui avait séjourné dans notre pays et qui est arrivé récemment au Vénézuéla.

Traduction

La Esfera
Dimanche, le 26 novembre 1939

LE THÈME DU JOUR
« Le Droit de Chacun »

Rares sont les thèmes idéologiques, politiques, sociaux, économiques ou autres, dont l’étude ne nous oblige pas à tourner nos regards vers cette France, devenue la directrice des peuples. Toute nouveauté chez les autres a été expérimentée chez elle. Et pour profiter de cette expérience dans nos initiatives, nous devons recourir à l’Histoire de France et y recueillir l’utile et le profitable.
Le peuple français a souffert de profondes convulsions dans sa recherche des grands idéaux humains. Tourments qui l’ont aveuglée parfois jusqu’à lui faire commettre des erreurs lamentables aux conséquences désastreuses pour le bien et le progrès. Mais quand le fauve se fatigue, cessent ses colères. À l’action dévastatrice déchaînée par ses passions, suit une étape de calme où l’esprit s’apaise. La leçon profite généralement. De l’histoire de leur patrie, les enfants de France ont reçu maintes expériences salutaires.
            C’est pour cette raison que le pays est idéal. C’est pour cette raison que la vie y a des enchantements que l’on ne trouve pas sous d’autres latitudes ; en France, il y a un certain parfum dans l’atmosphère, d’autres accents dans la nature et de rares stimulants dans les entreprises. C’est une vie toute autre qu’ailleurs : elle est forgée par le choc cruel des luttes passionnées ou le sectarisme a dû céder le pas et s’ajuster aux moules humains et raisonnables.
            Aujourd’hui, en France, les antagonistes les plus en opposition se croisent sur le chemin et ne se regardent pas avec acrimonie. Chacun d’eux poursuit sa route, travaille avec énergie, dispute le terrain avec sérénité, combat avec pondération. À côté de l’école laïque, se trouve l’école catholique ; au côté du Syndicat de la CGT celui de la CTFC. Ce pays, berceau de la laïcité, offre souvent aux regards, sur les bords de ses routes splendides et nombreuses, de grandes croix portant le Rédempteur. Ses monts sont surmontés de monuments à la Vierge. Le clergé français a écrit des pages vibrantes de patriotisme pendant la guerre de 1914 et il est de nouveau prêt à en écrire.
            Que de références à donner ! C’est toujours le sentiment humain, la compréhension et le patriotisme qui les inspirent : d’où le résultat. Aussi vivre sur le sol français constitue une illusion pour connaît la France. Mais mis à part ce cadeau qu’elle offre à tous ses visiteurs, la liberté dont on y jouit, la variété polychrome de sa vie, tous les terrains d’attraction qui s’y trouvent, ceux qui vivent loin d’elle peuvent recueillir le bénéfice de son expérience qui a coûté à la France des millions d’or, de vies et d’efforts. Cet héritage est au Service de l’humanité entière. Il faut seulement savoir choisir et adapter, avec sûreté et prudence. Tout ce qui est français ne serait pas utile au Vénézuéla, comme ne pourrait l’être, tout ce qui est espagnol, allemand ou anglais. Mais on aime surtout en France cette concorde qui n’empêche pas que les idéaux différents se disputent le terrain. Il y a toutefois quelque chose pour adoucir les divergences qui disparaissent quand survient l’heure du danger : c’est le patriotisme. Le Français est un patriote sans tâche. Autre aspect intéressant : le patriotisme ne doit pas être déclaré à travers les déclamations. Il faut être patriote dans les actes, c’est ainsi qu’est le Français et comme il sait l’être.
            Cette conquête a été obtenue grâce à la reconnaissance de la personnalité individuelle. Chaque Français est un citoyen avec tous ses droits. Celui d’en haut n’a aucun mépris pour celui qui est en bas et celui-ci ne haït pas celui qui est en haut. L’autorité garde toujours son prestige et veille à ce que les droits civiques soient respectés. Quand on commande, ont tient plus à l’estime populaire que quand on prétend commander.
            L’estime du peuple ne s’obtient qu’en respectant les droits de tous. C’est pour cela que la France nous paraît admirable et que la vie sur son territoire a des charmes qu’il est difficile de trouver autre part.
            L’histoire française est une source inépuisable d’expérience. Nous pouvons nous en servir et recueillir de son arbre touffu des fruits savoureux et d’un grand profit pour notre prospérité.


Signé : Spectator

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